Vu au cinéma en 2015 : épisode 1
Et c’est reparti pour une année de cinéma, sans popcorn ni publicité mais avec beaucoup de bons films espérons-le. Au programme de ce mini revue de rattrapage du mois écoulé, un conte africain tragique , un enlèvement pas banal , des gens un peu trop nerveux et un serial killer introuvable mais finalement retrouvé.
Timbuktu - Abderrahmane Sissako
Inspiré par une histoire vraie, (un couple illégitime lapidé), Abderrahmane Sissako s’est décidé à écrire ce film en forme de fable, visuellement très beau, jamais démonstratif, avec des personnages énigmatiques, des scènes étonnantes, parfois absurdes, mais avec toujours un sens profond, une idée derrière chaque séquence pour dénoncer de manière douce et métaphorique la main mise d’une bande d’intégristes plutôt ridicules qui essaient d’instaurer maladroitement et sans trop savoir comment s’y prendre la charia dans une petite ville imaginaire. Un film puissant et d’une grande poésie et injustement reparti bredouille de Cannes en 2014. [7.5]
La Rançon de la Gloire - Xavier Beauvois
Difficile de le croire, pourtant c’est bien le même Xavier Beauvois qui, il y a quelques années, sortait le subtil et bouleversant Des hommes et des dieux. Cette fois, il adapte l'incroyable histoire du kidnapping, par deux pauvres types (Rochdy Zem et Benoît Poelvoorde en roue libre), du cercueil de Charlie Chaplin, sur les bords du lac Léman en 1977. Malgré l’hommage poli rendu au roi du muet, difficile de s’enthousiasmer devant ce tout petit film, ni vraiment drôle, ni vraiment touchant, qui en plus est plombé par la musique belle mais envahissante de Michel Legrand. Dans un style qui rappelle plus les comédies noires, loufoques et fauchées de Mocky que celles des frères Coen, Xavier Beauvois se ramasse en beauté, avec sans doute son plus mauvais film à ce jour. Et pof ! [4.0]
Les Nouveaux sauvages - Damián Szifron
Produit par Pedro Almodovar ce film à sketches argentin constitue un agréable divertissement sur le thème du pétage de plomb, de la perte de contrôle, ou comment un homme, une femme voient à un moment donné leur vie basculer dans la violence. Soit lors d'un moment-clé de leur vie comme le mariage, soit lors d’un accident, soit lors d’une situation tout à fait banale (une crevaison sur une route secondaire). Relativement équilibrée, sans trop de faiblesse et au final plutôt jubilatoire, cette suite de court-métrages alterne humour absurde, burlesque, humour noir, comédie de situation, avec des personnages enlevés en guise de fil rouge une certaine ironie et une noirceur qui n’est pas sans rappeler certains films des frères Coen ou de Tarantino. [7.5]
L’affaire SK1 - Frédéric Tellier
Sk1 est le nom donné par la police au code génétique (à l’époque non répertorié) du serial-killer qui sévissait dans l’est Parisien dans les années 90. Si, "l’affaire Guy Georges" n’a cessé, durant de longues années, d’alimenter la rubrique des faits divers, et n’a aujourd'hui plus de secret pour personne, on trouvera pourtant un réel intérêt à suivre la reconstitution en flash-back de l’enquête proposée par Frédéric Tellier, qu’il met en parallèle avec le procès du tueur Guy Georges. Grâce au montage alterné, le réalisateur rend le film tout à fait captivant, montrant bien les dessous de l’enquête, les conditions de travail des flics, replaçant toujours l’histoire dans le contexte politique et social de l’époque. Pour l’anecdote, on précisera que la scène de l'interrogatoire de Guy Georges, magnifique de tension et d’intimité mêlée, entre Raphaël Personnaz et Adama Nian (tous deux excellents tout au long du film) a été écrite d’après le vrai procès-verbal rédigé par le policier (Charlie) qui a chapeauté l'affaire. [7.5]